Janvier 2010, nous passons une partie de l’hiver dans la maison de famille d’un ami, en Creuse. Il neige. Nous nous réveillons à 6 heures du matin, quand le corps de l’acteur est encore empli de sommeil, à la lisière du réveil. Damien convoque son personnage Chacal : un jeune homme sans destin. Je me souviens du regard perdu de mon grand-père, dépassé par les nouvelles autoroutes qui défient le temps et l’espace. Les voisins creusois parlent des tensions avec les communautés turques, de leur réseau d’embauche opaque dans le BTP. Damien rencontre un chef de chantier d’autoroute qui lui décrit les réseaux clandestins, et les morts réguliers sur ce type de chantier. Damien construit le personnage d’un jeune homme qui n’a rien choisi, sans conviction, et qui va devenir papa sans y être prêt. Chacal va provoquer sa disparition en mettant le feu à une station service et entrer dans un désert à la quête de sa fille fantôme : Lucie. 

Quand tu parles on n'entend pas ce que tu dis. C'est dans le silence que la vie négocie avec la mort. Pourtant il faudra bien lui trouver un nom. Dire qui c'est. C'est Lucie. C'est ma fille. Elle tient dans une poche tellement elle est petite. Tu verras. Un long chemin entouré d'arbres pour se protéger des étrangers, de la poudre à canon pour nettoyer les artères. Tes ancêtres ont bien travaillé petite, maintenant qu'il n'y a plus personne il va falloir marcher et apprendre à aimer.

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